Les trois princesses

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[Berthier :] Elles sont debout et comme appuyées l’une sur l’autre. À leurs pieds, les couronnes terrestres qu’elles ont méprisées. La bienheureuse Marguerite de Hongrie est au premier plan, les yeux baissés, et tenant de la droite une branche de marguerite avec deux fleurs dont l’une se dirige vers la bienheureuse Marguerite de Savoie placée à sa gauche. Ces fleurs indiquent les noms de ces deux illustres filles de saint Dominique. La bienheureuse Marguerite de Savoie se voit de profil, à droite du spectateur, tournée sur sa gauche, elle regarde le ciel en s’enfonçant dans la poitrine trois javelots aigus, symbole de la calomnie, de la maladie et de la persécution qu’elle accepta de souffrir en même temps pour son Dieu. La bienheureuse Jeanne de Portugal est à droite du groupe. Elle a refusé trois rois qui sollicitent sa main et contemple les yeux baissés un idéal meilleur qui a surgi dans son âme. Ce groupe est charmant, on dirait trois Grâces chrétiennes, élevées au dessus des autres autant que le ciel l’est au dessus de la terre.

F. Thiollier (dir.), Le R. P. A. Danzas de l’Ordre des frères prêcheurs. Ses œuvres artistiques. Texte par le R. . Berthier du même Ordre. Nombreuses héliogravures exécutées d’après les peintures et dessins originaux, Saint-Etienne, 1897, 31.
Biographie de la bienheureuse Marguerite de Savoie
  • Née à Pignerol (Piémont) vers 1382
  • Décès à Alba (Piémont) le 23 novembre 1464
  • Culte confirmé en 1669
  • Fêtée le 27 novembre

Fille du duc Amédée II de Savoie et de son épouse Catherine, nièce du pape d’Avignon Clément VII, elle fut mariée en 1403 à Théodore II Paléologue marquis de Montferrat (veuf de Jeanne, fille du duc de Bar et de Lorraine). Elle fut une épouse attentive à l’égard de son mari et des deux enfants qu’il avait eus de son premier mariage (ils étaient à peine plus jeunes qu’elle). Comme elle ne put avoir d’enfants, ce furent les pauvres qui le devinrent par sa générosité. Sa piété, déjà grande, grandit encore lorsque saint Vincent Ferrier eut séjourné quelques mois à Montferrat.

Ce mariage fut heureux, mais le comte mourut le 20 décembre 1415 (ou 1418). Devenue veuve et régente, elle éleva avec générosité son beau-fils Jacques jusqu’à sa majorité, et gouverna avec sagesse. Elle laissa la direction des affaires du marquisat à Jacques, fit vœu de chasteté et en 1420, guidée par saint Vincent Ferrier, elle entra dans le Tiers-Ordre de Saint Dominique, dans son château d’Alba. Peu après, le duc Filippo Maria Visconti de Milan la demanda en mariage mais elle refusa et il le prit mal. Avec quelques jeunes femmes, elle transforma Alba en monastère dominicain, y entra en 1448 et devint abbesse. Redoublant de mortifications, elle fit de rapides progrès dans la voie de la perfection et mourut saintement. Comme, à travers les œuvres de piété, de mortification et d’amour du prochain, ne se laissant pas prendre aux liens et persécutions humains et diaboliques, elle avança toujours dans l’amour de Jésus, elle reçut aussi de lui la grâce d’obtenir aussitôt ce qu’elle demandait dans sa prière. Le Seigneur fit d’innombrables miracles sur sa tombe.

Biographie de la bienheureuse Jeanne de Portugal
  • Née le 16 février 1452 à Aveiro
  • Décès le 12 mai 1490 à Aveiro
  • Culte confirmé en 1692.
  • Fête le 12 mai

Fille du roi de Portugal Alfonso V et de la reine Isabel de Coimbra, Joana avait 3 ans quand sa mère mourut en mettant au monde son fils Joao. L’enfant fut alors confiée aux bons soins de la bonne et sainte Beatriz de Menezes. La santé délicate de son frère et la mort de sa mère faisaient d’elle l’héritière probable du trône, et elle fut éduquée dans cette perspective. Pourtant, depuis l’enfance elle ne s’intéressait qu’au service de Dieu. Elle fut maintes fois demandée en mariage (le Dauphin de France, Maximilien d’Autriche, Richard III d’Angleterre). Quand elle eut 16 ans, elle demanda à son père la permission d’entrer en religion. Il refusa, mais renonça provisoirement à la marier et l’autorisa à mener au palais une vie retirée. En 1471, Alfonso et Joao entreprirent une expédition contre les Maures. Joana, qui avait 19 ans, assura la régence du royaume avec grande compétence. La guerre terminée, la princesse demanda encore à entrer au couvent, son père accepta. Elle distribua ses biens personnels et partit au couvent des Bernardines d’Ordivellas, pour attendre l’autorisation d’entrer chez les Dominicaines d’Aveiro, où la règle était sévère et gardée très strictement. Son père et son frère ne voyaient pas d’un bon œil cette retraite, aussi ils la harcelèrent pendant longtemps, allant jusqu’aux menaces et à l’enlèvement, pour qu’elle revienne. Finalement, le 4 août 1472, elle entra chez les dominicaines, prit l’habit en 1475, mais ne put prononcer ses vœux que lorsque la succession au trône fut assurée, en 1485. Cependant, la princesse fit tout son possible pour mener la vie d’une simple religieuse, se réservant les travaux les plus humbles. Elle consacra tous ses revenus à la charité, spécialement au rachat des captifs. Elle fut le refuge des pauvres, des orphelins et des veuves. Elle offrait ses souffrances pour la rédemption des chrétiens captifs en Afrique et pour la conversion des pécheurs. Sa famille s’inquiétait pour sa santé, et pendant une épidémie de fièvre ils insistèrent pour qu’elle quitte Aveiro, dont le climat était insalubre.

Elle mourut à 38 ans, d’une fièvre contractée en buvant de l’eau contaminée (ou peut-être empoisonnée par une femme qui avait des griefs contre elle). Elle mourut à l’heure qu’elle avait elle-même prédite, pendant que ses sœurs récitaient la litanie des saints. Arrivées à l’invocation : « Tous les saints innocents, priez pour nous », elle leva les yeux au ciel et expira doucement dans le Seigneur. Les miracles signalés sur sa tombe sont nombreux. Patronne d’Aveiro.

Biographie de sainte Marguerite de Hongrie
  • Naissance vers 1242 à Klissza (aujourd’hui Klis près de Split en Croatie)
  • Décès le 18 janvier 1270 à Budapest
  • Béatifiée en 1278
  • Canonisée en 1934
  • Fêtée le 18 janvier

Fille de Béla IV Árpád (1206-1270), roi de Hongrie et de Maria Laskaris (fille de l’empereur de Nicée Théodore Ier Lascaris), nièce de sainte Élisabeth de Hongrie, et petite-nièce de sainte Edwige de Silésie, Marguerite naît tandis que sévit en Europe l’invasion des Tartares (ou Mongols). Béla IV rassemble en hâte ses forces et se porte au-devant d’eux. Le 11 avril 1241, en un lieu appelé Mohi, les Mongols remportent une éclatante victoire sur les Hongrois qui sont presque tous massacrés, Béla IV lui-même fuit en Dalmatie. Ils ravagent les régions du Danube avec un raffinement de cruauté. L’Europe est à leur merci. Pour obtenir la libération de leur pays, ses parents consacrent Marguerite à Dieu dès avant sa naissance par un vœu, et l’envoient, à l’âge de 3 ans ½ , au monastère des Dominicaines de Veszprem près de Budapest. Le roi ayant ensuite en 1252 fondé pour elle un monastère du même ordre dans une île du Danube, l’île aux Lièvres (appelée maintenant île Margit), Marguerite y est transférée ; elle y fait profession deux ans après, à l’âge de 12 ans, et refuse énergiquement une demande en mariage du duc Boleslaw le Généreux. Elle mène une vie de moniale très mortifiée et très humble tout en étant favorisée de charismes. La guerre éclatant à la suite d’une dissension dans sa famille au sujet de la succession au trône, elle redouble ses pénitences et n’hésite pas à adresser de vifs reproches aux grands et à son père lui-même qui se met à la persécuter ; mais après quatre années de conflit, la paix est conclue dans l’île aux Lièvres. Elle doit encore refuser une demande en mariage, présentée par son père pour des raisons politiques.

Elle aimait l’humilité et la pénitence. Elle couchait sur le plancher de sa chambre et n’avait qu’une pierre pour chevet. Quand elle était malade, elle cachait son état pour n’être pas obligée d’user des adoucissements permis aux malades. Sa douceur était admirable ; et si une sœur paraissait avoir contre elle le moindre sujet de mécontentement, elle allait se jeter à ses pieds pour lui demander pardon. Marguerite eut dès l’enfance une tendre dévotion envers Jésus crucifié. Elle portait continuellement sur elle une petite croix faite du bois de celle du Sauveur, et l’appliquait souvent sur sa bouche, la nuit comme le jour. Elle priait de préférence devant l’autel de la croix. Pendant la messe et à l’approche de la communion, elle pleurait abondamment. La veille du jour où elle devait communier, elle jeûnait au pain et à l’eau, et passait la nuit en prière. Le jour de la communion, elle priait à jeun jusqu’au soir, et ne mangeait que le minimum vital. Elle honorait spécialement la Vierge Marie. Elle vivait le plus pauvrement possible et donnait aux pauvres tout l’argent que lui donnait son frère, le roi Étienne V. Elle cherchait les tâches les plus rudes et les plus humbles, pratiquait de rigoureuses pénitences. En retour, elle fut couronnée de dons mystiques assez étonnants.

Elle ne soupirait qu’après le moment qui la réunirait à son divin époux. Ses désirs furent enfin accomplis ; elle tomba malade et mourut, âgée de 28 ans. Sa tombe devint rapidement un lieu de pèlerinage. Son corps est dans la ville de Presbourg. « Rien entre moi et Dieu » était sa devise.

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